« Une action inadmissible et intolérable »

Agriculteur à Congerville-Thionville (Essonne), Antoine Benoist est président du syndicat local Beauce- Gâtinais et administrateur de la FDSEA Île-de-France. 

 » Depuis près d’un mois, le contexte géopolitique aux frontières de l’Europe nous préoccupe tous. Le conflit qui oppose l’Ukraine à la Russie n’est pas sans rappeler de sombres pages de notre histoire et Vladimir Poutine est comparé, ça et là, à un ancien dictateur allemand. L’homme a définitivement la mémoire bien courte. 

Dans ce contexte tragique, une bande d’abrutis — je n’ai pas d’autres mots — n’a rien trouvé de plus malin à faire le week-end dernier que d’intercepter un train de blé en Bretagne et de déverser 1 500 tonnes de céréales sur les rails. À 2 500 kilomètres de chez nous se joue une guerre qui aura bientôt des répercussions planétaires sur l’accès à l’alimentation et le prix des denrées. On nous promet des famines dans plusieurs pays du globe et certains — que cela ne semble pas déranger — mènent des actions qui consistent purement et simplement à gaspiller de la nourriture en nous parlant d’écologie et en prônant des discours de sous-production. 

Je m’étonne de la faible couverture médiatique de cet événement alors que les journalistes évoquent le conflit Ukraine/Russie du matin au soir. N’ont-ils pas fait le lien entre les deux ? Les grands médias savent pourtant parler d’agriculture lorsqu’il s’agit de nous « taper dessus »… 

Alors, je m’interroge : les gens sont-ils trop heureux ? Sont-ils trop habitués à avoir une assiette pleine trois fois par jour pour ne pas se rendre compte du drame qui est en train de se jouer ? Vont-ils se réveiller un jour ou finalement, est-ce déjà trop tard ? 

Bien avant le début du conflit en Ukraine, on parlait déjà de problèmes de production. Il est évident que cela ne va pas s’arranger. Alors, à mon sens, il est plus que malvenu aujourd’hui de parler de sortie du nucléaire, de sous-production ou de je ne sais quelle autre aberration. Et gâcher de la nourriture au nez et à la barbe de ceux qui, demain, en manqueront, est un profond manque de discernement et de respect. 

Pour rappel, il se vend aujourd’hui dans les pays du Maghreb des céréales à 100 euros plus cher que lors du Printemps arabe. La catastrophe n’est pas loin. J’espère que les auteurs des actes du week-end dernier seront punis à la hauteur de leur bêtise et du préjudice qu’ils ont causé. »